A l’UCAO-UUA, c’est le grand vide, après le départ en congés des étudiants (REPORTAGE)

A l’UCAO-UUA, c’est le grand vide, après le départ en congés des étudiants (REPORTAGE)

 

À l’Université Catholique de l’Afrique de l’Ouest-Unité Universitaire à Abidjan (UCAO-UUA), en raison de la période des vacances de Pâques (du 23 mars au 08 avril 2024), c’est le grand vide. La vie est au ralenti dans plusieurs secteurs d’activités. Un reporter du theoricien.ci a, de visu, fait le constat.

 

Ce jeudi 04 avril 2024, le soleil n’a pas encore fini d’étendre tous ses rayons, lorsque nous arrivons à l’entrée principale de l’UCAO-UUA. Il est 07h30. La Rue Sainte Marie qui jouxte l’université est comme un boulevard dégagé pour quelques rares voitures personnelles ou de service qui y vont chacun à son rythme.

D’ordinaire, c’est l’heure où l’école grouille de monde, le moment favorable où les taxis et les bus pullulent pour déposer les étudiants. Mais en ce jour, ici, les différents portails sont fermés, les tourniquets sont au repos. Il se fait un silence glacial. Et les taximen sont comme alertés du désert ambiant, ils sont très peu à planer par là.

Assis à son poste de contrôle des entrées des étudiants, un jeune homme habillé en tricot jaune assorti dans un « jean » marron, balance ses pieds fourrés dans des godasses noires et longues.  Pour M. Zézé Franck, puisque c’est de lui qu’il s’agit, vigile à l’UCAO-UUA, « pendant les congés, la vie n’est plus comme avant. Tout est paisible. Tout est calme, ce n’est pas comme l’ambiance qu’on voyait avant, lorsque les étudiants sont là. Il n’y a pas beaucoup de monde ».

Son collègue, M. Brou Assi Stéphane, qui vient de se relever d’un sommeil léger sur une table placée dans la guérite, réitère les mêmes sentiments : « Je préfère la présence des étudiants ; quand ils sont là, on cause avec eux, ils empêchent de dormir, on est à l’aise avec eux ».

Toujours à l’entrée de l’Université, en face de la vigie, c’est le Service Accueil et Renseignements : là-dedans se trouve assise Mme KONATE Mariam, qui accueille quelques personnes désirant obtenir des renseignements à propos de cette école. Même dit : « je ne m’ennuie pas », elle se plaint du fait que « les femmes qui assurent la restauration s’en vont en même temps que les étudiants en congés ». La conséquence majeure, c’est qu’il n’y a « pas à manger au niveau de la cafétéria »

Qui plus est, « quand je rentre dans la cour, tout est vide. Je me sens un peu seule. Il y a un vide que je ressens. Quand je me retrouve dans la cour, j’ai l’impression que je suis au milieu d’un désert. C’est nettement mieux, l’ambiance avec les étudiants ».

Et il suffit de franchir le portail pour voir les différents bâtiments respirer, eux aussi, cette solitude. À l’intérieur de l’université, les salles de cours des instituts et facultés sont fermées hermétiquement. Aux alentours de la statue béante de Saint Augustin, la présence humaine est une denrée rare ; seulement quelques voitures du personnel sont stationnées ; pourtant les différents drapeaux, suspendus du haut de leur mât, respirent allègrement, à la faveur d’un vent léger qui souffle.

Des signes de vie au service de la scolarité

 

Plus loin, au service des inscriptions-réinscriptions-validation des reçus de banque-attestation et certificat de fréquentation, il y a encore des signes de vie. Il est 09h. Quelques étudiants sont là, assis sur les banquettes, habillés en bigarré, les yeux rivés sur leur smartphone, écouteurs aux oreilles ; d’autres sont debout, reçus ou cartables en mains, sacs en bandoulière ; plongé dans un silence d’impatience, chacun attend son tour de passage à l’un des guichets.

Ehui Marie-Emmanuelle Monique, étudiante en IEG, venue accompagner sa camarade pour valider son reçu, estime que « l’ambiance est agréable, il n’y a pas trop de bruit, puisque « d’habitude, c’est assez mouvementé mais là, c’est très calme ». Cependant, elle a « hâte de revoir ses camarades ».

Au fond de ce service, en face du dernier guichet, le n°6, c’est Konaté Yacina, habillée en robe, de teint clair, aux lunettes teintées de noir et de blanc, cartable rose sur les cuisses, sac-à-main rose sur la banquette.

Étudiante en Master II, Gestion, Option Audit et Contrôle, Miss Konaté est « là en vue du retrait de (son) diplôme de Licence et l’obtention d’une lettre de stage ». D’un air triste, la vingtenaire déclare : « UCAO est vide ; on se rend compte que sans les étudiants, UCAO n’est rien ; il n’y a plus de vie. L’ambiance n’est pas joviale ; elle est plutôt triste, calme ; d’habitude, c’est bruyant, il y a la joie ; quand il y a les étudiants, c’est chic ; on retrouve nos amis ».

« Quand ils ne sont pas là, c’est moche » (sic)

 

En cette matinée de vacances de Pâques, on peut parcourir au moins 10 mètres dans les couloirs de la meilleure université privée de Côte d’Ivoire, sans croiser quelqu’un.

Il est 10h lorsque nous nous parvenons au milieu de l’école, entre le terrain de sport et la chapelle. Cet espace est vide ; Partout, palmiers, cocotiers et autres arbres sont les seuls à s’imposer par un bruit léger perceptible aux oreilles ; ajouté aux chants des oiseaux perchés dans ces arbres, un concert naturel domine ce paysage silencieux.

De l’autre côté, on aperçoit, dans le couloir en bas des bâtiments de la faculté de philosophie, un monsieur à la démarche nonchalante, raclette et sachet-poubelle de couleur noire à la main droite, un seau de couleur verte contenant une serpillère à l’autre main, vêtu d’une tenue complète haut et bas verts. Il s’agit de M. Kouamé Michel dit Blé Goudé, agent d’entretien à l’UCAO-UUA.

« Quand il n’y a pas d’étudiants, UCAO est vide ; il n’y a pas d’ambiance ; UCAO est calme. Nous travaillons par rapport aux étudiants ; quand ils ne sont pas là, c’est moche ; on n’a pas beaucoup de choses à faire, ça nous gêne ; quand ils sont là, nous nous sentons importants », affirme cet agent d’entretien.

La « Chine populaire » de la faculté de Droit meurt de silence

 

A l’autre bout de l’UCAO, le gigantesque bâtiment de la faculté de Droit est vide de ses milliers d’étudiants ; il ressemble à une mère qui n’a jamais enfanté. Il est 11h. Mais tout autour, on ne voit personne ; il faut aller dans la boutique La terrasse, en face de la chapelle, jouxtant la sacristie, pour trouver une présence humaine. A l’intérieur deux dames devisent, assises face à face.

L’une d’entre elles, Mlle Zézé Marie Ange, est étudiante en Licence II -Droit civil. Venue à l’école pour réviser ses leçons en vue des examens, elle trouve l’ambiance sèche, certes, mais « favorable aux révisions ».

Sa camarade, Mlle Kouakou Marie-Laure, est, elle, caissière dans cette boutique. Elle nous confie que « même s’il n’y a pas d’étudiants, nous sommes obligés de garder la boutique ouverte. Il y a moins de clients. Le coin est déserté. On n’a presque personne avec qui causer. On a hâte de retrouver nos clients habituels ainsi que nos proches ».

Le marché gastronomique durement touché…

 

Il est exactement 12h00 lorsque nous mettons pieds à la cafétéria de l’Université. Ce lieu de restauration des étudiants est complètement dépeuplé. Les tables à manger sont pratiquement orphelines ; la plupart des stands sont fermés.

Au milieu de cet espace gastronomique, se trouve Mlle Ahou Jocelyne, étudiante en Master II, Droit des affaires-Fiscalités ; c’est une jeune fille aux cheveux tissés, de teint clair, à la taille moyenne ; elle est habillée en tee-shirt rose et pantalon noir : les yeux baissés, elle est concentrée sur son plat d’alloco aux œufs cuits, qu’elle mange, accompagné d’un bidon d’eau de marque AkwabaO à côté.

« Je suis venue à l’école pour rédiger mon mémoire. L’ambiance n’est comme en présence des étudiants ;  c’est assez relaxe, apaisant, calme ; ça permet d’étudier ; pendant les congés, quelques-uns des étudiants profitent pour venir étudier », confesse-t-elle.

Près d’elle, un monsieur de passage en tee-shirt bleu rayé de blanc assorti d’un « jean » noir, M. Porquet Marie Yangor, étudiant en Licence 1, Droit civil, estime que « le climat est silencieux parce que quand les étudiants sont là, il y a du bruit ; là, UCAO est plutôt calme ; Je sens un certain ennui car je me suis habitué à des amis ; maintenant qu’ils ne sont pas là, c’est un peu différent ».

Dans ce marché, quelques rares commerçants résistent à la solitude ambiante. A l’intérieur d’un des rares stands ouverts, Krah Solange, une commerçante résiliente, se débrouille. Nous pénétrons dans ce stand. Elle s’active pour faire cuir sa recette d’alloco. C’est une très petite quantité d’alloco qu’elle est en train de frire.

Elle porte un bébé au dos dont les cris correspondant à une série de petits sons brefs et saccadés « Èh ! Èh ! Èh ! ». Ces cris se font entendre même à distance puisqu’ils avaient suffi à nous convaincre de la présence humaine alors que nous nous approchions de ce lieu.

« Quand les étudiants ne sont pas là ; ça nous gêne un peu ; l’ambiance n’est pas bonne, le coin est calme ; on est au chômage, on n’arrive pas à vendre. Je prépare pain-condiments, alloco, attiéké, poisson », nous explique la jeune dame.

 

L’Université Catholique de l’Afrique de l’Ouest-Unité Universitaire à Abidjan (UCAO-UUA) ouvrira de nouveau ses portes aux étudiants le lundi 08 avril 2024, au compte du dernier trimestre académique, avant les grandes vacances.

 

PALE Bèbè Gaétan

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