« Papa, maman, si je meurs vous l’aurez sur votre conscience »
Le mariage forcé est le fait de marier une personne contre sa volonté. Il s’agit d’un mariage arrangé où la famille impose le mariage à un enfant. Le jeudi 08 avril 2021, notre équipe de rédaction s’est rendue aux environs de 10h, à la Riviera Palmeraie, au domicile de madame Alima Fofana, secrétaire de direction dans une structure de la place, mariée et mère de deux enfants.
Dès l’âge de 13 ans, elle a été accordée en mariage à un vieil homme de 65 ans par le biais de ses oncles.
ER : Bonjour madame Alima. Dans votre enfance, vous avez été victime de mariage forcé. Pouvez-vous nous relater les faits ?
Madame Alima : Bonjour madame. Merci pour l’occasion que vous me donnez en ce jour. Je suis originaire de Korhogo, dans le nord de la Côte d’Ivoire. Dans notre culture, nous dépendons de nos oncles maternels, c’est le matriarcat. Et nos parents n’ont aucun droit sur nous. Quand les oncles voient un homme riche ou celui qui est capable de soutenir financièrement ou matériellement la famille, ils mettent tout en ouvre pour accorder une de leurs nièces en mariage à ce dernier. Cela fut mon cas. Etant petite, mon père ne cessait de m’apprécier. Je faisais plus que mon âge. C’est ainsi que mes oncles maternels ont résolu de m’accorder en mariage à un vieil homme riche de notre région. Ayant appris, j’ai commencé à agir violemment en paroles envers mes parents. J’ai eu à dire à mes parents que si cette situation persiste, j’irais me jeter à l’eau pour mettre fin à ma vie. Papa, maman vous l’aurez sur votre conscience.
E.R : Quelle a été votre réaction vis-à-vis de vos oncles ?
Madame Alima : Face à mes oncles, vu mon âge, je n’avais aucun mot à dire. Je voyais ma liberté bafouée. Il m’est arrivé de les qualifier d’inhumain en toute sincérité. Au fond de moi je me disais qu’ils ne voulaient pas me voir grandir et réussir dans la vie. Quand ils viennent nous rendre visite en famille, mon attitude n’était pas favorable même si le respect y régnait.
E.R : Comment vous vous sentez 17 ans après ? Et quels conseils pouvez-vous donner à vos jeunes sœurs qui se retrouvent dans cette situation aujourd’hui ?
Madame Alima : 17 ans après cette affaire, je me sens bien car j’ai lutté pour ne pas tomber dans leur jeu. Je ne voulais pas de ce mariage forcé. Actuellement, je me sens libre, capable de décider de ma vie. Je suis responsable de ma vie. La preuve en est que je me suis mariée à l’âge de 25 ans avec celui que mon cœur a choisi. Aujourd’hui, je suis mère de deux petites filles adorables.
En 21ème siècle, je voudrais dire à mes jeunes sœurs qui vivent cela dans leur culture de s’accrocher à Dieu quelle que soit leur religion. En mettant notre confiance en lui, il est capable de créer une situation dans le but de nous tirer d’affaires. Une autre chose aussi est de nous ouvrir à des personnes extérieures qui pourront mieux nous guider et nous aider en ce sens. Avec les expériences des uns et des autres, nous devenons capables de sauver des vies et de venir en aide à toutes ces femmes et jeunes filles qui subissent encore le martyre à cause se ce phénomène.
Sr pierre Angèle